Le G20 joue sa pertinence. (Article paru dans la Presse 24/09/09)
En avril
2009, au plus fort de la crise financière puis économique, les chefs d’État des
20 plus grandes puissances économiques se sont quittés après le sommet de
Londres avec une série de mesures destinées à mettre un terme au tourbillon de
la crise : lutte contre les paradis fiscaux, dotation de 1 100
milliards auprès du FMI pour soutenir le crédit, amélioration des règles
comptables et de notation.
Six mois
plus tard, les mêmes chefs d’État vont se retrouver à Pittsburgh pour faire un
bilan de leurs précédentes décisions et établir un nouveau programme de réformes.
Cette fois-ci, le contexte a profondément changé : premiers signes de
reprise, regain des places boursières, confiance des ménages en progrès.
Pourtant, le
G20 persiste dans un entêtement dialectique autour de la régulation des marchés
financiers en proposant un encadrement plus strict des bonus accordés aux
courtiers des établissements bancaires et financiers. Est-ce le cœur du
problème ou une réponse politique à un problème qui dépasse largement la simple
logique réglementaire ? Il y a de fortes raisons de penser qu’il s’agit
essentiellement d’une réponse politique qui esquive les vrais défis économiques
auxquels sont confrontés l’ensemble des pays – et pas seulement les 20 plus
puissants.
L’effet
symbolique – pour ne pas dire cosmétique – de lister les paradis fiscaux non
coopératifs, de réclamer aux banques de meilleures règles prudentielles ou de
blâmer les primes des meilleurs courtiers est sans commune mesure avec la
nécessité d’assurer un retour durable à la croissance et, ce qui requiert une
attention toute particulière, une stratégie de retour à l’équilibre budgétaire.
L’inscription
à l’agenda du sommet du G20 de Pittsburgh des enjeux de finances publiques de
l’après-crise paraît incontournable. Pourquoi ?
La première
raison relève de la contrainte qu’une politique budgétaire expansionniste fait
peser sur les choix publics futurs. En clair, une politique expansionniste qui
stimule l’économie à court terme a souvent des conséquences négatives à long
terme : inflation, augmentation des taux d’intérêt, etc. Et c’est sans
compter sur le fait que les ménages et les entreprises puissent décider
d’épargner (plutôt que de consommer) ou de moins investir aujourd’hui, anticipant
les hausses d’impôts futures que les États devront inévitablement mettre en
œuvre pour rembourser la dette accumulée pour financer les plans de relance.
Cette limite des plans de relance budgétaire a été mise en évidence par
l’économiste David Ricardo… au 18ème siècle !
Une deuxième
raison tient à la nécessité de coordonner, à l’échelle
internationale, les stratégies de retour à l’équilibre budgétaire pour éviter
l’apparition de comportements de resquillage par certains pays. C’est le dilemme classique de la
coopération internationale appliqué à la relance budgétaire : en
l’absence de coopération, certains pays bénéficieront de l’engagement
budgétaire des autres.
Il est donc impératif que les pays du G20 planifient ensemble l’après-crise, dès maintenant. Au cours de la dernière année, l’urgence commandait certes d’intervenir très rapidement. Résultat : 5 000 milliards de dollars engagés par les États sous forme de plans de relance et autres interventions des banques centrales. Le G20 joue maintenant sa pertinence et sa pérennité sur sa capacité à coordonner la réponse des grandes économies aux contrecoups de ces plans de relance d’une ampleur sans précédent. Il en va de la durabilité de la reprise économique mondiale, et de l’utilité même du G20 comme forum économique international.
Martial Foucault, professeur de science politique à
l’Université de Montréal
Marcelin Joanis, professeur de science économique à l’Université de Sherbrooke
Comments